« ISSU DE L'HOSTILITE DU MONDE... »
Empêché, il advient
Les pressions d'un environnement lui-même mutant font changer les êtres de formes, chercher d'autres moyens d'être au monde, des chemins, des armes, des dispositifs, plus forts que ce qui existe, les contraint et les soumet.Poéticide
Le mutantisme ne propose pas une vision idyllique de la mutation : si les mutantistes se créent des mutations pour affirmer leur souveraineté, ils ne peuvent se dissimuler que, la plupart du temps, ils subissent et créent des mutations pour survivre : ce sont des déformations sous le marteau de la violence du monde.
Nous sommes dans une époque-désert. On ne peut même
pas imaginer ce qui nous manque, ce qui aurait pu être.
Nous vivons un cauchemar éveillé qui ne finit jamais, où
nous n'avons pas notre place.
Nous ne disons pas ce que nous voulons. Ce que nous pensons ne sera jamais
dit.
Cette civilisation hait, par-dessus tout, la poésie. Elle passe
ses citoyens à l'aérosol poéticide (également
sacricide et liberticide) : un aérosol métaphysique qui
TUE la poésie, le sacré (le sentiment du sacré ;
à ne pas confondre avec la religion, qui est son administration)
et la vraie liberté (à ne pas confondre avec la « liberté »
de pouvoir gagner et dépenser de l'argent). Jamais les mots de
« liberté » et de « révolution »
n'ont été autant utilisés (en particulier par la
publicité), jamais ils n'ont été à ce point
vidés de leur substance.
Les êtres humains sont poéticidés, et invités
à vivre et penser comme des blattes.
Soldats perdus d'armées dissoutes, les mutantistes sont ceux qui
survivent aux aérosols poéticides, dans une société
de vendeurs, de publicitaires et de consommateurs.
Pendant des heures ils regardent les essaims d'oiseaux qui se forment
et se déforment, s'unissent en boules et tores et explosent en
étoiles, lors de l'arrivée du froid et des grandes migrations.