MACHINES
Film mutantiste
Application du syntexte à la vidéo : comprimages, film d'information
accélérée, entre la vidéo et le diaporama, vortex filmique
protéiforme : prendre pour exemple les images stroboscopiques
du clip de Den Harrow
Future Brain [1:46-2:03 ; 2:54-3:10]
(1984, clip visionnaire quant à ce qui sera plus tard l'afflux d'informations
Web) ; le film mutantiste est un magma concentré de
données, de signes, sur le monde et sur l'humain (plusieurs
options : a/ défilement d'images rapide mais pas trop, restant au-
dessus du subliminal ; b/ film d'images subliminales, si rapides
qu'on ne "voit" rien, sinon une forme mouvante), un magma à
vocation éducative.
Les mutantistes réalisent des films en 24 langues différentes par
seconde. L'idéal est d'atteindre une mécanique, une rythmique,
un visage-monde, un condensé vue-son (mais le son n'est pas
obligatoire), un réseau de signes qui explose et transforme la
boule du cerveau en oeil de mouche à facettes, en goutte à
facettes aux yeux de mouche et tacts d'oursin.
Les images défilant à toute vitesse constituent un archétype de
vision en état de conscience modifiée, comme en témoignent
certaines visions sous transe, ou certaines visions-EMI (expérience
de mort imminente), ou certains états oniriques rares.
Jérémy Narby décrit ainsi une vision sous ayahuasca (il parle
d'une "télévision de la forêt", avec une dimension de connaissance)
:
"Je me mis à vomir des couleurs et quittai mon corps pour voler
au-dessus de la Terre.
Je vis des images défiler à une vitesse
ahurissante, par exemple les nervures d'une main humaine
alternant avec les nervures d'une feuille végétale. Les visions
défilaient sans relâche, je ne pouvais les retenir toutes. »
Ou encore : "
Je voyais des images kaléidoscopiques devant
mes yeux. Des images inondaient ma tête. Dans mes notes,
je les décris comme "inhabituelles ou effrayantes : un agouti qui
montre ses dents et dont la bouche est ensanglantée, des serpents
multicolores, très brillants et scintillants, un policier qui me
fait des problèmes, mon père qui me regarde d'un air soucieux"...
Je vole dans les airs, des centaines de mètres au-dessus
de la terre, et, regardant en bas, je vois une planète toute
blanche. Je ne vois plus que des images confuses, dont certaines
à contenu érotique, comme un femme avec vingt seins ! Je
vois une feuille verte, avec ses nervures, puis une main
humaine, avec les siennes, et ainsi de suite sans relâche. C'est
impossible de se souvenir de tout."
Ces visions indiquent une direction à prendre pour le film mutantiste
: un stroboscopisme encyclopédique (un stroboscopisme
éclairé) et un magma subliminal à vocation éducative.